[1/2] Que faire avec l'IA ?
👉 Bulle ou révolution ?
Sommes-nous dans une bulle IA comme en 2000 ? Non. Les marchés sont tirés par quelques géants de l’IA déjà rentables, tandis que le reste du S&P 500, l’Europe et la Chine restent plus fragiles et moins euphoriques.
En quoi l’IA est-elle une vraie révolution industrielle ? Elle automatise des tâches cognitives, bouscule des métiers qualifiés, creuse l’écart entre ceux qui l’utilisent et les autres, et finit par faire baisser le coût de nombreux services.
Comment l’IA redistribue-t-elle les gagnants et les perdants en Bourse ? Perdants : acteurs comme Teleperformance, dont le modèle est automatisable. Gagnants : vendeurs de matériel, exploitants de datacenters et géants comme Alphabet, Amazon ou Microsoft qui monétisent déjà l’IA.
Où se situe le vrai risque aujourd’hui ? Le danger vient du surinvestissement dans l’infrastructure IA si la demande déçoit, avec des profils vulnérables comme OpenAI, Meta, Oracle ou des “passagers clandestins” type Oklo.
Temps de lecture : 19 mins.
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📰 Le contexte récent
Beaucoup estiment en ce moment que les marchés sont au plus haut alors que l’économie va mal, et comparent la situation à la bulle des années 2000. La réalité est plus nuancée.
Aux États-Unis, l’économie est pénalisée par les taux, mais moins qu’avant : les ménages sont aujourd’hui beaucoup plus protégés grâce aux prêts immobiliers à taux fixe dont la proportion a fortement augmenté par rapport à 2007. En revanche, les secteurs sensibles au crédit comme l’automobile, l’immobilier ou l’investissement des entreprises souffrent nettement, tout comme l’emploi affecté par l’IA, les expulsions massives et les nouvelles taxes douanières.
L’inflation ralentit mais reste incertaine avec les surtaxes de Trump. Si l’économie se dégrade encore, les suppressions d’emplois liées à l’IA pourraient paradoxalement aider la Fed à baisser les taux plus vite. Ce qui soutient réellement les marchés, ce sont les géants américains de l’IA et de la tech : la concentration du S&P 500 sur quelques valeurs n’a jamais été aussi forte. Elles tirent pour le moment le marché, alors que le reste de l’économie est plus faible.
En Europe, les indices sont aussi à leurs sommets, portés par les grandes valeurs internationales et la perspective d’une reprise mondiale. Les petites capitalisations, elles, restent sous pression.
En Chine, la démographie en chute libre, l’immobilier en crise et les restrictions américaines créent un contexte durablement déprimé, malgré les efforts d’automatisation.
En résumé, le dynamisme européen et chinois dépend largement des États-Unis. Cependant, la politique de taux de la Fed reste incertaine, l’inflation reste assez difficile à prévoir et la croissance fragile. Dans ce brouillard, les valeurs liées à l’IA apparaissent comme les seules capables de continuer à porter le marché… mais pour combien de temps ?
Des doutes sur l’IA ?
Commençons par 2 questions réponses simples.
Est-ce qu’il y a une bulle sur l’IA ? similaire aux années 2000 ? Je ne le pense pas.
Est-ce qu’il y a une certaine euphorie sur certaines valeurs IA ? C’est plus que possible.
Pour commencer avec la bulle des années 2000, c’est totalement différent. Lors de la bulle internet, très peu de valeurs avaient un business dans ce domaine. La moindre boite qui montait un site web, qui avait un peu de traffic, et qui mettent “.com” à son nom, était valorisée des millions voire des milliards… alors qu’il n’y avait généralement aucun, je dis bien aucun, business autour. Il y a eu à ce moment une euphorie incroyable, une peur de manquer le train, qui a conduit toutes ces valeurs à exploser à la hausse, puis à corriger fortement ou à disparaitre quand les investisseurs ont demandé des comptes. La hausse des taux de la Fed a cette époque a aussi été un facteur déclenchant du retour à la réalité… Dans le contexte actuel, c’est plutôt l’inverse qui peut se produire avec une Fed qui est plus en mesure de soutenir l’économie en générale, et le secteur de l’IA via une baisse des taux.
Une euphorie sur certaine valeurs ? C’est tout à fait possible. Comme tout mode, ou hype en bourse, qu’elle soit réelle ou non, il y aura toujours des passagers clandestins ou des brebis galeuses. Les passagers clandestins en bourse, c’est les valeurs qui ont un lien avec cette mode, qui en profitent fortement en bourse, mais qui, à l’heure des comptes, ne délivrent pas les promesses faites aux marchés, ou à défaut, les espérances que le marché avait placé en elles. Les brebis galeuses, c’est celles qui ont un lien directe avec la thématique à la mode, mais qui n’arrivent pas à transformer l’essai en une vraie opportunité business. Bref, dans cette révolution IA, qui me semble plus que réelle (je vais y revenir juste après), il y a surement des passagers clandestins, et des brebis galeuses, nous le saurons sur les prochaines années.
L’IA est une vraie révolution industrielle
Comme l’illustrait un récent article du Wall Street Journal, l’IA semble être une vraie révolution, mais elle n’apparait pas comme ça dans les médias… car les gens sont plutôt dans leur ensemble anxieux vis à vis de cette révolution.
C’est une révolution de l’automatisation ET donc de la productivité. De ce fait, oui, elle va bouleverser des secteurs entiers, des marchés de l’emploi, de multiples métiers etc. Beaucoup de personnes vont perdre leur emploi, car il seront remplacés par une machine, ou par un collègue qui devient 2 fois plus productif avec l’IA.
A chaque grande révolution industrielle, la société a été bouleversée, l’emploi a été transformé, et des millions de personnes ont dû changer de métier, parfois après des vagues de licenciements massifs.
Lors de la première révolution industrielle (1760-1840), les “Luddites” cassaient les machines par peur de perdre leur travail… et ceux qui ne maîtrisaient pas les nouvelles machines perdaient leur emploi.
Lors de la deuxième révolution industrielle (électricité, moteurs, 1880–1914), il y a eu un déclin brutal des métiers traditionnels (forgerons, charretiers, porteurs…) et la naissance d’une nouvelle classe ouvrière spécialisée (mécaniciens, électriciens), la transition a été violente car très rapide.
Lors de la troisième révolution industrielle (informatique, 1970–2000), il y a eu une disparition massive des emplois administratifs (secrétariat, archivistes, standardistes), une automatisation dans les usines (vagues de licenciements dans l’industrie) et une explosion des jobs informatiques, logiciels, télécoms. Ceux qui savaient utiliser un PC ont prospéré. Les autres ont galéré.
Lors de la révolution numérique et des plateformes (2005–aujourd’hui), une partie du retail et des services traditionnels a été balayée par Uber, Amazon ou Deliveroo, entraînant la disparition de milliers de commerces physiques et la création de nouveaux métiers liés au digital comme community manager ou data analyst. Ceux qui ont su se réinventer dans l’économie en ligne ont avancé, les autres ont décroché.
Enfin, avec la révolution autour de l’IA (2022 à nos jours), l’impact est encore plus profond. Les métiers cognitifs sont directement touchés, avec la disparition des tâches intellectuelles répétitives, la restructuration massive des emplois de bureau et des vagues de licenciements préventifs chez les géants de la tech. Les jeunes diplômés subissent une pression inédite, les postes d’entrée de gamme se réduisant fortement. L’IA automatise désormais des tâches non physiques et creuse le fossé entre ceux qui maîtrisent ces outils et ceux qui restent en marge.
Pour ma part, je pense la révolution autour de l’IA est d’autant plus violente qu’elle ne touche pas que les métiers de base, mais aussi des métiers beaucoup plus techniques, des métiers respectés, des métiers ou il fallait d’importantes études/connaissances pour y accéder, ou encore des métiers récents (ie community manager etc.).
Comme dans toutes les révolutions, ceux qui vont embrasser cette évolution et les utiliser pour augmenter leur productivité vont s’en sortir, les autres risquent de se marginaliser.
Détenir une compétence qui n’est pas automatisable par l’IA n’est pas forcement quelque chose d’exceptionnel. Je pense à mon plombier… qui intervient en ce moment chez moi pour mettre à jour une installation qui a 40 ans, sans tout casser, petit à petit. C’est technique, c’est manuel, ça demande de l’improvisation, une IA n’est pas prête de le faire.
A l’inverse, beaucoup de métiers intellectuels, certains qui se pensaient protégés par de longues études, par des barrières à l’entrée juridique, et qui n’exerçaient leur métier qu’en récitant leur connaissance, vont être remis en cause, et c’est une bonne chose, car cela va permettre de baisser le coût pour la société de ces services.
In fine, chaque révolution industrielle permet de réduire le prix de certaines choses, en les rendant infiniment plus accessibles… ce qui booste la croissance économique.
Internet avait déjà révolutionné l’accès à la connaissance, l’IA fait passer à un second niveau cette révolution, en y ajoutant de l’intelligence.
L’IA n’est pas une hype passagère en Bourse comme l’a été l’hydogène, le métaverse, les entreprises solaires en 2007, c’est une vraie révolution industrielle.
L’IA en Bourse
L’IA chamboule tout. Certaines entreprises en bourse vont voir leur business pris d’assaut, d’autres vont s’en servir pour optimiser leur productivité, d’autres encore vont surfer sur cette manne car elles vendent de l’IA et permettent à leurs clients de gagner en productivité.
Dans la catégorie des perdants, je pense inexorablement à Teleperformance.
Sa spécialité, c’était d’emboucher des milliers de personnes peu qualifiées pour faire du SAV, du support etc. C’est des fonctions supports qui sont en train d’être grandement remplacées par l’IA. Elles ne vont pas disparaitre, cependant, un % de plus en plus grand est fait par des IA, ce qui diminue les besoins en humains… et donc se traduit par une demande atone pour TEP. Pour le moment, TEP résiste bien en termes de business mais le marché lui, n’y croit pas, et pense que les ventes du groupe vont d’avantage baisser à l’avenir, d’ou une valorisation très basse, PER de 5x… comme dans l’automobile !
Je ne vais pas m’attarder sur les entreprises classiques qui vont intégrer l’IA et qui vont s’en servir pour augmenter leur productivité et rester à la page. C’est grosso-modo toutes les entreprises qui vont tenter de faire ça. Elles n’ont pas le choix.
Ce qui m’intéresse davantage, c’est toutes les entreprises qui vendent de l’IA, ou qui s’en servent pour booster la demande de leurs produits/services.
Dans ce segment, il y a principalement 3 catégories. Les vendeurs de matériels, les exploitants de matériels, et les concepteurs de LLM.
Il y a actuellement une période de doutes sur l’IA, car les investissements sont colossaux, et les retours sur investissement semblent incertains. Cette période de doute coïncide avec un contexte global tendu : des marchés au sommet mais porté essentiellement par l’IA et la perspective d’une baisse des taux alors que l’économie américaine donne des signes de faiblesse…
Cependant, sur l’IA, je constate que nous avons toujours, et peut-être de plus en plus des signaux positifs. Pas chez tout le monde je vous l’accorde, mais chez les principaux.
Les vendeurs de matériel (Nvidia, AMD, Schneider, etc.), ceux qui sont sur le business des datacenters, sont rentables, voire très rentables sur leurs activités IA. Aucun problème pour eux.
Ceux qui gèrent, financent et exploitent les datacenters, AWS (Amazon), Azure (Microsoft), Alphabet etc., se portent très bien. Leurs investissements, bien que gigantesques, trouvent preneurs. C’est-à-dire qu’il y a des clients finaux pour louer ces datacenters à un bon prix. Aucun problème pour eux pour le moment. Ici, les clients sont les entreprises qui font des LLM comme OpenAI, mais aussi toutes les entreprises qui développent leur LLM interne pour leurs usages spécifiques avec leurs données.
Pour finir, le segment le plus à risque, c’est les concepteurs de LLM qui revendent leurs LLM en tant que services aux particuliers ou aux entreprises, ou qui les utilisent en interne pour leurs usages. Concernant les LLM, tous les regards sont tournés vers OpenAI, qui n’est pas encore rentable. OpenAI ambitionnerait de le devenir d’ici 2030. Pour le moment, OpenAI fait d’énormes levées de fonds pour financer la construction de datacenters. Le nerf de la guerre est d’arriver à rentabiliser ces investissements, c’est-à-dire de trouver suffisamment de clients pour payer ces infrastructures, et faire un profit.
Dans ce domaine, OpenAI est sans doute l’acteur le plus à risque, car c’est un pure player sur la conception de langage LLM, qui n’avait pas de business en amont.
C’est très différent de Meta, Microsoft ou Alphabet, qui financent ces investissements via leurs bénéfices générés par leurs autres activités très rentables, et qui se servent de leurs IA pour renforcer leurs business actuels, et en créer de nouveaux.
Le problème cependant, c’est que OpenAI a un rôle prépondérant dans toute cette révolution, et que si le groupe n’arrivait pas à devenir rentable, ce serait une mauvaise nouvelle pour beaucoup d’entreprises.
OpenAI est par exemple un des plus gros clients de Nvidia, et ce dernier vient d’annoncer 100 milliards d’investissements dans OpenAI étalés sur les prochaines années pour financer la construction d’infrastructures, bien évidemment avec des produits Nvidia. Si OpenAI doit finalement ralentir, réduire ses investissements, ce sera une mauvaise nouvelle pour Nvidia.
OpenAI a aussi un énorme partenariat avec Microsoft. Ce dernier détient 27 % du capital d’OpenAI. OpenAI s’est engagé à acheter 250 milliards de dollars de services cloud Azure de Microsoft... Microsoft monétise déjà l’IA d’OpenAI via tous ses produits et services. Cependant, si OpenAI devait réduire ses prévisions de croissance, cela pourrait impacter négativement la branche cloud de Microsoft…
Ce que j’observe, c’est néanmoins que les géants de la tech me semblent assez disciplinés dans leurs investissements dans l’IA. Ils ont tous (ou presque) conscience du risque, et font en sorte d’en être, sans aller trop loin.
Microsoft, par exemple, vient de publier des résultats trimestriels solides, dépassant les attentes du marché en termes de chiffre d’affaires et de bénéfices. Cependant, les investisseurs restent préoccupés par le rythme d’investissement massif dans l’intelligence artificielle, proche de 80 milliards de dollars pour l’exercice en cours. La société a revu légèrement à la baisse ses prévisions d’investissement, ce qui pose des questions sur la dynamique de la demande future, ou qui illustre la prudence du groupe sur la rentabilité de ses investissements (je pense que c’est ça).
Du côté d’Alphabet (Google), les résultats qui viennent d’être publiés sont très solides, avec un chiffre d’affaires dépassant significativement les attentes et la première fois qu’il franchit les 100 milliards de dollars sur un trimestre. La croissance s’est montrée particulièrement forte dans le cloud (+34 % sur un an) et la rentabilité globale s’est améliorée, avec un bénéfice par action supérieur aux estimations et une marge d’exploitation robuste. Les segments publicitaires, que ce soit sur Google ou YouTube, sont également en très forte progression grâce aux activités IA.
Chez Amazon, on a eu un chiffre d’affaires record de 180,2 milliards USD (+13% sur 1 an), porté par e-commerce, publicités et surtout AWS, dont les ventes ont progressé de 20% à 33 milliards de dollars. Le bénéfice net monte à 21,2 milliards de dollars, dopé par un gain exceptionnel (ie comptable) de 9,5 milliards de dollars sur son investissement IA chez Anthropic. Le bénéfice par action atteint 1,95 USD, en hausse de 36%. Amazon investit massivement dans l’IA et les infrastructures : capex trimestriel de 34 milliards de dollars, avec accent sur puces propriétaires et data centers. L’assistant shopping IA “Rufus” est déployé auprès de 250 millions de clients. La guidance T4 est solide : Chiffre d’affaires attendu entre 206 et 213 milliards USD (+10 à 13%), bénéfice opérationnel entre 21 et 26 milliards de dollars. Les marges résistent face à la hausse des investissements IA.
Quant à Meta, la société a publié un chiffre d’affaires meilleur que prévu, mais son bénéfice net s’est effondré de 83 % à cause d’une charge fiscale exceptionnelle de près de 16 milliards de dollars. Cette charge a impacté le résultat par action, très inférieur aux attentes du marché. Les dépenses d’investissement ont, elles aussi, fortement progressé, ce qui nourrit des doutes sur le potentiel retour sur ces investissements, notamment dans l’IA. Par ailleurs, la marge d’exploitation a reculé et le marché s’inquiète de la capacité de Meta à transformer ses investissements en croissance rentable. Je vais revenir sur le cas de Meta.
Du coté des équipementiers, AMD a annoncé s’attendre à une forte accélération de sa croissance dans les prochaines années, portée par la demande explosive en centres de données et en processeurs IA. Le groupe prévoit que ses nouvelles gammes de puces MI300 et Epyc bénéficieront du boom de l’intelligence artificielle générative et des investissements massifs des géants du cloud.
Pour finir, Nvidia vient de publier un chiffre d’affaires record de 57 milliards de dollars (+62% sur un an), dopé par la division Data Center (+66%, 51,2 Mds) grâce à la montée en puissance de l’IA chez les hyperscalers et dans le cloud. Le bénéfice net atteint 31,9 milliards de dollars, la marge brute reste très élevée à 73,6%, malgré un léger repli. Les GPU de nouvelle génération Blackwell tirent la croissance, tandis que les activités gaming et visualisation progressent respectivement de +30% et +56%. Jensen Huang a souligné que la demande mondiale pour Blackwell dépasse l’offre et que l’adoption de l’IA générative n’en est qu’à ses débuts. Nvidia prévoit un T4 à nouveau supérieur au consensus (guidance CA : 65 milliards de dollars). Huang réfute l’idée d’une bulle IA : “Le cycle d’investissement est structurel, la demande surpasse toutes nos capacités, même hors Chine”. Il a également mis l’accent sur la robotique et l’automobile comme axes de diversification, avec des “capex massifs chez tous les hyperscalers partenaires”.
In fine, tous les acteurs traditionnels de la tech qui investissent en ce moment dans l’IA ne sont pas égaux. Certains, comme Alphabet, Amazon ou Microsoft, arrivent déjà à monétiser leurs investissements dans l’IA. D’autres se font attendre (Meta, par exemple). Et pour OpenAI, même si la société vaut sur le papier 500 milliards de dollars, c’est encore une startup qui doit prouver/trouver son modèle d’affaires…
De son côté, Nvidia encaisse. Le groupe a les meilleurs produits pour ce marché. Je vais y revenir juste après.
En ce moment, les géants de la tech répètent qu’il est plus risqué de ne pas assez investir dans l’infrastructure IA que de trop investir. Altman, Zuckerberg et d’autres justifient des dépenses massives dans les data centers et les puces, convaincus que l’IA générera des revenus colossaux. Mais les investisseurs commencent à douter, la frénésie actuelle pourrait ressembler à une bulle, et l’histoire montre que surinvestir peut être catastrophique.
Prenons l’exemple d’Intel, qui au début des années 2020 a surinvesti pour rattraper TSMC et Samsung. Capex explosés, paris technologiques ratés, ralentissement du marché : résultat, un désastre financier. Cash-flow négatif presque permanent, projets annulés, ventes d’actifs, licenciements, dividende supprimé, PDG évincé. L’entreprise a fini affaiblie au point que le gouvernement américain a pris 10 % du capital. Intel vaut aujourd’hui 1/26ᵉ de Nvidia, alors qu’elle valait plus il y a cinq ans…
La leçon, c’est que des investissements massifs ne permettent pas à coup sur de gagner. Si la demande d’IA est surestimée, les géants pourraient se retrouver coincés avec des infrastructures surdimensionnées, des write-downs, et des années de pression financière. Les entreprises très agressives, je pense à Oracle, CoreWeave, ou Meta, sont les plus vulnérables si l’IA ne rapporte pas aussi vite qu’espéré.
En revanche, les leaders solides peuvent absorber un éventuel excès d’investissement. Alphabet apparait encore une fois comme le plus prudent : malgré son avance dans l’IA, ses capex ne représentent que 23 % de ses revenus, bien moins que Microsoft, Amazon ou Meta.
Bref, dans la catégorie des géants, le risque me semble assez concentré sur OpenAI… et sur les quelques entreprises qui investissent beaucoup mais qui ne monétisent pas.
Il y a bien évidemment des entreprises qui surfent sur cette tendance un peu comme des passagers clandestins. Je pense par exemple à Oklo, qui développe un réacteur nucléaire à fission, qui ne fait aucun chiffre d’affaires, mais qui vaut 20 milliards de dollars, car leur hypothétique technologie (sur le papier pour le moment) pourrait être une solution pour répondre à la demande énorme d’énergie pour les datacenters IA.
Selon JP Morgan, alors que l’ensemble du S&P 500 se négocie actuellement autour de 25 fois les bénéfices, le reste de l’indice hors “Magnificent Seven” (Nvidia, Microsoft, Apple, Alphabet, Meta, Amazon, Tesla), c’est-à-dire en excluant les valeurs plutôt dominées par l’IA, se négocie environ à 19 fois les bénéfices forward, soit un niveau certes inférieur aux géants de l’IA, mais bien au-dessus de la moyenne historique, qui tourne autour de 16.
Si on écrème davantage les géants, la valorisation des 490 entreprises restantes du S&P 500 semble davantage raisonnable et parfois sous pression, handicapée par des perspectives jugées moins dynamiques, surtout sur les secteurs cycliques, industriels ou financiers.
Ce qu’il faut retenir : Je dirais que nous ne sommes pas vraiment dans une bulle, car la plupart des valeurs qui portent les marchés, essentiellement les 10 plus grosses capitalisations, sont en forte croissance, sont rentables, et pour certaines ont même leurs activités liées à l’IA déjà rentables, ou profitent de l’IA pour augmenter leur croissance et leur rentabilité, ce qui est très différent de l’an 2000 où toutes les valeurs n’étaient même pas des ChatGPT... On parle quand même pour ChatGPT de 13 milliards de dollars de chiffre d’affaires en 2025, et d’une valorisation de 500 à 1000 milliards si l’entreprise rentre en Bourse d’ici l’an prochain… Seul l’avenir nous dira si OpenAI était une bulle, ou une entreprise d’avenir…
Bref, que retenir de tout ça pour nos investissements ?
C’est ce que nous verrons demain soir dans la 2e partie de ce dossier (réservée aux abonnés Premium du Fortress Club 💎).
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